
Photo RUSKA.
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Un jour, un homme fait un faux-pas.
Un jour comme les autres, un homme comme les autres. A une
différence, une différence près : cet
homme est maçon, de métier. Une oscillation qui
ne se décide pas pour un retour à la position
initiale. Il a basculé, tout entier.
Au
milieu d'une vie, une vie de maçon, vers cinquante ans,
l'été, au midi d'une journée, c1est un
accident ordinaire. La chaleur, un bref instant de fatigue. Ou
simplement, seulement, le hasard d1un faux-pas.
Il
y a eu triple fracture du rocher, cet os temporal où est
logée l'oreille, l'oreille interne. "Comme un lapin. Je
saignais, là...". Le tympan crevé, le sang
écoulé au dehors, l'ont sauvé. De la
mort, d'une surdité. La tête, c'est tout ou rien.
On dit ça. Ça n1a rien été.
Il a suffi de garder la tête immobile, un mois. L'homme n'a
rien senti. Pas une douleur, pas un mal de tête.
La
vie a continué. Il travaille. Trop. Comme un noir, dit sa
femme. Il se tait, beaucoup, toujours beaucoup. Mais là,
peut-être, quelque chose s'est
déplacé. Il se tait moins, on pourrait dire
ça. Non qu'il parlerait plus. Il se tait
énormément, et il prend la parole soudain.
Julien
parle. Il raconte ses rêves. Les rêves de la nuit.
Julien écrit : son enfance et ses rêves. "Le
réel", il dit.
Qu'est-ce
qui s'est passé ?
"Je
me suis senti balancer".
Presque
rien. Une fraction de seconde, le temps d'un battement de
paupières. Rien de grave. Au contraire. Une ivresse, Si
brève.
L'événement
au milieu d'une vie.
Simple
hypothèse.
(Texte lu en voix off par Raymonde Carasco)
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Dans l'accident, Julien a reconnu la
précipitation des signes.
"A
l'âge de sept ans, j'ai rêvé que je suis
tombé la tête en bas, et je suis resté
évanoui. Mais je savais que cela m'arriverait à
l'âge de cinquante deux ans." Etranges rencontres. Ce miracle
du
Micalet, par exemple, qui ouvre 'Le livre de Julien" : "né
à Valencia, Espagne, le 17 février 1912, un jour
de Mardi-Gras, rue El Micalet, face à la
cathédrale de Valencia. La légende dit : un jour,
quand on construisait la tour, un maçon est tombé
du haut de la tour. Mais Micalet, qui passait à ce
moment-là dans la rue, a vu l'homme en train de tomber. Je
dirai que c'est une tour très haute. Micalet a dit en levant
la main : "Espera !" Et le maçon est resté en
l'air, là, jusqu'on ait pu l'attraper. Le Maçon
n'a pas été blessé. Voilà
pourquoi on appelle la tour et la rue Micalet."
A
voir ces rapports, l'homme pourrait prendre la décision de
faire siens les hasards d'une existence. Créer la
nécessité de
l'événement. Arracher l'accident
à la tyrannie des faits. Alors il parle, il
écrit, il cherche son expression.
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Le film, à partir de cette
hypothèse et des textes du Livre de Julien, compose un
portrait, entre le documentaire et la fiction, entre le plan de la
réalité quotidienne (les lieux réels
de l'enfance, les gestes de travail) et le plan de cette autre
réalité, mystique et poétique, que
Julien appelle "Le réel" ou "Ma Croyance".
Car
la complexité de l'individualité de Julien est ce
mélange singulier entre l'exercice rigoureux du
métier de maçon qu'il aime
passionnément, et cette force de voyance qu'il appelle "Ma
Croyance".
Le
montage du film construit d'une seule coulée ces deux plans
de la réalité ordinaire et d'un Réel
mystique et poétique. Et sans doute, telle
séquence où Julien plâtre un plafond,
où la matière du plâtre travaille la
matière pelliculaire elle-même (plans
tournés en noir et blanc et tirés sur
internégatif couleur) appartient-elle autant
à la fiction que la mise en scène en studio du
rêve final des Rayons Jaunes.
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NOTES SUR LA REALISATION DU FILM
La
composition colorée unifie les trois types d'images que
tisse le film:
- 16 mm, Noir et blanc et Couleur, extraites du
film Julien - Portrait d'un voyant (1978), Image : Régis
Hébraud
- 16 mm, Noir et blanc et Couleur,
tournées dans l'Aude en Février 83.
Opérateur I.N.A : Jacques Bouquin.
- 35 mm, Couleur, tournées en studio en
Janvier 83. Directeur
de la photographie : Dominique Lerigoleur.
Le
montage (à l'intérieur des plans comme des plans
entre-eux) travaille la couleur par contraste (opposition des
gris-bleus / des jaunes-rouges) et par modulation (gris de la pierre,
gris-bleu du noir et blanc tiré sur internégatif
couleur, atmosphère bleutée des
Corbières l'hiver, bleu intense du studio/vert des
feuillages l'été/jaune des roseaux, or et pourpre
des vignes en automne, rouge léger du salon de
Félines, rose-oranger d'un coucher de soleil d'artifice ou
d'une aurore studio, jaune-vert cru du laser).
Mais
c'est surtout la voix de Julien, à la fois brute et musicale
(tantôt "en direct", tantôt off), qui trace ses
propres lignes de vie, traverse lieux et rêves d'un courant
continu. Musique à entendre avec celle des machines, de
l'eau, de Schumann.
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Photo RUSKA.
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INTERPRETATION
Julien CARASCO et
Luc BERNAND
Emmanuelle H.
Jérôme KEEN
Jean-Marc MONTEL
Bruno REINA
Didier ROUSSET
Kunutchi UNO
Ida AMEKH CHOUM
Sophie FONTAINE
Valérie JEANET
Martine LA COUSTILLE
Nell RAYMOND
Jean-Louis ROLAND
Jean-Paul SCHNEIDER
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FICHE
TECHNIQUE
Réalisation
Raymonde CARASCO
Image Dominique LE
RIGOLEUR, Jacques BOUQUIN et Régis
HEBRAUD
Son Jean MALLET
Effets spéciaux
image Laser mouvement, Spectra
Spectacle France.
Effet spéciaux son
Films du Silence
Décor
Daniel DE BROIN
Costumes Dominique
LACOUSTILLE
Scripte Fabienne
BENSIMON
Assistants à la
réalisation Joey FARRE et Régis
HEBRAUD
Montage Gabrielle
ZUBOVIC, Pascale SUEUR
Musique de Robert
SCHUMANN : extraits de "Kreusleriana" et de "L'amour et la vie d'une
femme"
Le Livre de Julien aux
Editions "TRIBU"
BP 3044
31024 - Toulouse Cedex
UNE PRODUCTION DE L'I.N.A
film
16 mm couleur et N x B
Durée
: 50 minutes environ
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